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Recommandation 1466 de l’Assemblée Parlementaire concernant l’Education aux médias, juin 2000

  1. Avec l’avènement de la société de l’information, l’individu vit aujourd’hui plongé dans un flot de messages véhiculés par les médias. Apparemment, il n’y a pas de limite à la quantité d’informations disponibles.
  2. Cependant, de nouveaux défis apparaissent. Les médias modernes offrent d’innombrables sources d’information et permettent à tout un chacun, dans des proportions jamais connues à ce jour, de lancer des messages dans l’espace public. Il devient de plus en plus difficile de s’orienter dans cette masse considérable d’informations. Les problèmes résultent non seulement du volume, mais aussi de la nature des communications. La réalité des médias n’est pas la réalité «vraie». Or, dans un monde dominé par la culture des médias, la frontière entre fait et fiction devient souvent floue.
  3. Cependant, pour beaucoup d’enfants et de jeunes, les médias modernes et surtout Internet sont plus qu’un simple moyen de s’ouvrir sur le monde. Les médias sont «leur» monde, leur «réalité virtuelle», où tout, le meilleur et le pire, peut être fait et défait. Les jeunes font souvent preuve de beaucoup plus d’enthousiasme que les adultes pour l’utilisation des nouvelles technologies et ils les maîtrisent bien mieux que leurs aînés, mais leur capacité de discernement et leur aptitude à émettre des jugements réfléchis ne sont pas encore bien développées.
  4. Souvent, enseignants et parents ne parviennent pas à combler le fossé entre leur vécu et leur expérience professionnelle, d’une part, et l’expérience que vivent leurs enfants à travers les nouveaux médias, d’autre part. De nombreux adultes ont de plus en plus de mal à s’adapter aux changements envahissants apportés par les moyens de communication modernes.
  5. A une plus grande échelle, les médias sont, par nature, capables d’influer sur les attitudes et les comportements dans la société. On ne manque pas d’exemples en Europe montrant que les médias libres et indépendants exercent un réel pouvoir de promotion de la démocratie, alors qu’entre les mains de forces totalitaires ils peuvent devenir des instruments d’incitation à la haine raciale et de manipulation de l’opinion. On entend dire souvent aussi qu’il existe un lien étroit entre l’augmentation de la violence dans la société et la violence des images véhiculées par la télévision, Internet ou les jeux vidéos.
  6. La mondialisation et la convergence des médias, à côté de toutes les merveilleuses possibilités qu’elles offrent, suscitent également de nouvelles inquiétudes: surabondance d’informations, uniformisation en raison de la prédominance absolue d’une seule langue et d’une seule culture sur les nouveaux médias, commercialisation accrue, sans parler du risque grave de voir naître de nouvelles formes d’exclusion sociale pour ceux qui ne peuvent pas communiquer à travers des médias et/ou sont incapables d’en évaluer le contenu d’un œil critique.
  7. Les démocraties européennes disposent de nombreux instruments pour relever les défis que pose cette société en mutation. La situation actuelle montre, toutefois, qu’il est urgent aussi de développer des mesures éducatives plus fermes et plus radicales pour favoriser l’utilisation active, critique et réfléchie des médias ; en d’autres termes, pour mettre en place une éducation aux médias.
  8. L’éducation aux médias peut se définir comme des pratiques d’enseignement ayant pour but de développer certaines compétences liées à l’utilisation des médias, à savoir une attitude critique et réfléchie vis-à-vis des médias pour former des citoyens équilibrés, capables de se forger leur propre opinion à partir des informations disponibles. Grâce à cette éducation, les citoyens doivent pouvoir accéder aux informations nécessaires, les analyser et identifier les intérêts sous-jacents d’ordre économique, politique, social et/ou culturel. L’éducation aux médias consiste à apprendre aux individus à interpréter et à créer des messages, à sélectionner les médias les plus appropriés pour communiquer et, finalement, à influer davantage sur l’offre et le contenu des médias.
  9. L’éducation aux médias permet aux individus d’exercer leur droit à la liberté d’expression et leur droit à l’information. Elle n’est pas seulement bénéfique pour leur développement personnel, elle développe aussi la participation et l’interactivité dans la société. En ce sens, elle les prépare à la citoyenneté démocratique et à la prise de conscience politique.
  10. L’éducation aux médias fait partie du programme scolaire dans plusieurs pays européens, néanmoins son application reste problématique, même en ce qui concerne les médias traditionnels. Les éléments clés de l’éducation aux médias sont des enseignants qualifiés et le matériel d’enseignement ; par conséquent, il convient d’accorder une attention constante à la formation initiale et continue des enseignants. Des incertitudes persistent aussi quant à la place de cette éducation dans les programmes, sa méthodologie, les objectifs poursuivis et l’évaluation des résultats. En outre, la plupart des établissements scolaires n’ont pas encore intégré un schéma pédagogique dans lequel élèves et enseignants se placent en situation d’apprenants.
  11. L’éducation aux médias devrait s’adresser à la fois aux adultes d’aujourd’hui et à ceux du futur. L’objectif n’est pas seulement de les aider à suivre le rythme du développement moderne, il est aussi de leur apprendre à mieux remplir leur rôle de parent. Dans cette perspective, il est vital de concevoir une éducation aux médias dans le cadre d’un apprentissage tout au long de la vie. Cette éducation non formelle devrait être dotée de plus de moyens et il faudrait faciliter les travaux des ONG pertinentes, conformément à la Recommandation de l’Assemblée 1437 (2000) sur l’éducation non formelle.
  12. Il est indispensable aussi de rechercher la coopération et la participation des professionnels des médias. Il faut surtout les encourager à produire des programmes éducatifs et culturels de grande qualité.
  13. L’Assemblée recommande donc au Comité des Ministres:
  14. de considérer l’éducation aux médias comme un secteur d’activité important pour les organes compétents de l’organisation dans les domaines de l’éducation à la citoyenneté démocratique, des nouvelles technologies de l’information et de l’éducation non formelle, conformément aux orientations définies dans la Recommandation 1437 (déjà développée plus haut);
  15. de veiller à une approche coordonnée, intersectorielle de cette question;

iii. d’examiner les pratiques en vigueur dans le domaine de l’éducation aux médias dans les Etats membres afin de promouvoir celles qui donnent les meilleurs résultats;

  1. de promouvoir une approche européenne intégrée de l’éducation aux médias en créant éventuellement un bureau international pour l’éducation aux médias, responsable de la coordination et de la mise en réseau en étroite collaboration avec d’autres organisations internationales, comme l’Union européenne et l’Unesco.
  2. Le Comité des Ministres devrait aussi inviter les gouvernements et les autorités compétentes des Etats membres:
  3. à encourager l’élaboration et le développement de programmes d’initiation aux médias pour les enfants, les adolescents et les adultes;
  4. à promouvoir l’élaboration et le développement de programmes de formation pour les enseignants dans le domaine de l’éducation aux médias;

iii. à amener les organismes éducatifs, les organisations parentales, les professionnels des médias, les fournisseurs de services Internet, les ONG, etc., à prendre part au dialogue sur ces problèmes;

  1. à étudier le moyen d’encourager l’offre, par les différents médias, de programmes éducatifs qui soient satisfaisants sur les plans à la fois quantitatif et qualitatif, et de promouvoir l’éducation aux médias dans ces programmes.

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  1. Discussion par l’Assembléele 27 juin 2000 (19e séance) (voir Doc. 8753, rapport de la commission de la culture et de l’éducation, rapporteuse: Mme Isohookana-Asunmaa).

Texte adopté par l’Assemblée le 27 juin 2000 (19e séance).

Les Conclusions du Forum de Frascati, septembre 1988

Concernant l’initiation aux langages de l’image et du son:

RÉSUME

Sous les auspices du Conseil de l’Europe, et dans le cadre de l’Année européenne du cinéma et de la télévision (AECTV), un forum s’est tenu à Frascati (Italie), du 27 au 29 septembre 1988, sur le thème de « L’initiation aux langages de l’image et du son et la formation des professionnels du cinéma et de la télévision », organisé par le Conseil de la coopération culturelle, avec le soutien actif du Comité directeur de l’AECTV.

Une soixantaine de participants (experts gouvernementaux, éducateurs, professionnels de l’audiovisuel et journalistes spécialisés) ont participé aux débats. Ceux-ci ont confronté des expériences nationales très diverses, des préoccupations communes se sont exprimées et des choix d’orientation se sont précisés.

Les conclusions complètes présentées sous leur responsabilité par les rapporteurs généraux aux participants se trouvent dans le document Decs/AC (88) 24 publié par le Conseil de l’Europe.

Le Forum de Frascati à été un événement déclencheur de la création de l’AEEMA.

« L’initiation aux langages de l’image et du son »

–         Au cours de ce forum, nous avons traité d’éducation, de formation, d’interactivité entre les publics et les créateurs européens. Nous avons parlé de diversité et non de perte d’identité culturelle ;

Nos travaux ont concernés trois sortes d’individus :

  • les enseignants et leurs élèves ou leurs étudiants ;
  • le grand public ;
  • les créateurs de messages audiovisuels ;

Révélant la richesse et la diversité des expériences nationales, la première journée a mis l’accent sur les préoccupations communes et les choix d’orientation à préciser. Il est apparu que.

–         l’initiation aux langages de l’image et du son demeure indissociable de l’éducation aux médias ;

–         cette éducation doit être intégrée dans la formation générale de l’individu et donc prise en compte par les systèmes éducatifs, les réseaux culturels et les télévisions ;

–         l’initiation aux langages de l’image et du son proprement dit suppose :

  • la formation des enseignants ;
  • la mise en place d’équipements adaptés aux structures de formation, au niveau, à l’âge des enseignés ;
  • la production d’un matériel didactique adapté aux besoins des enseignants et des enseignés ;

–         l’initiation aux langages de l’image et du son doit s’appuyer à la fois sur la lecture et l’écriture des signes, la connaissance et la pratique du vocabulaire, le maniement des outils et la découverte des techniques ainsi que celle de l’environnement et des œuvres ;

–         cette initiation, garante d’un niveau minimal du public et d’une réelle communication entre les professionnels, les créateurs et ce public, concerne tous les partenaires du cinéma et de l’audiovisuel . Mais autant il est important – et dans son intérêt – que l’industrie du cinéma et de la télévision participe financièrement, collabore au développement  de l’éducation à l’image, autant il est indispensable qu’elle confie aux seuls spécialistes de l’éducation et de la culture le choix des contenus et des méthodes de formation.

Parmi les propositions faites au cours des débats, ont été retenues :

  • la poursuite de l’enquête lancée par le Conseil de l’Europe afin d’établir un panorama plus précis de la situation dans les différents pays membres du Conseil de la coopération culturelle ;
  • la constitution d’un groupe de travail restreint en liaison permanente avec le Comité d’experts gouvernementaux pour le cinéma chargé notamment de réfléchir aux perspectives européennes ouvertes lors du forum de Frascati ;
  • la constitution d’un programme européen minimal commun d’initiation aux langages de l’image et du son établi à partir des expériences nationales et des propositions faites à Frascati.

Ce programme faisant apparaître :

–         l’importance de la collaboration entre tous les partenaires de l’audiovisuel : professionnels, enseignants, publics ;

–         l’importance des relations entre l’audiovisuel, les autres médias et les autres langages ;

–         la liberté laissée à chaque utilisateur du programme quant au choix de ses méthodes d’enseignement, dans le respect des objectifs communs : une meilleure communication entre les créateurs des messages individuels et les publics, une meilleure adéquation entre le message et le langage audiovisuel.