Rapport de la Commission de la culture et de l’éducation de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe, juin 2000

Doc. 8753

6 juin 2000

Education aux médias

Rapport

Commission de la culture et de l’éducation

Rapporteur: Mme Tytti Isohookana-Asunmaa, Finlande, Groupe libéral, démocrate et réformateur

Résumé

Dans la société de l’information, l’individu vit plongé dans un flot de messages véhiculés par les médias, mais est-il vraiment mieux informé et capable de faire la distinction entre la réalité et ce qui lui est présenté dans les médias ? Pour beaucoup de jeunes, dont l’aptitude à émettre des jugements de valeur est encore peu développée, les médias modernes sont leur «réalité virtuelle», où le meilleur et le pire peut se faire et se défaire. De façon globale, une nouvelle forme d’exclusion sociale menace ceux qui ne peuvent communiquer à travers ces médias et/ou sont incapables d’en évaluer le contenu d’un oeil critique.

Le rapport souligne la nécessité de promouvoir l’éducation aux médias pour aiguiser le sens critique et la faculté de discernement vis-à-vis des médias et former des citoyens qui se forgeront leurs propres opinions sur la base des informations dont ils disposeront. L’éducation aux médias devrait s’adresser aux enfants, aux parents et aux enseignants et s’étendre tout au long de la vie, ce qui suppose une approche coordonnée à laquelle devraient participer les organisations non gouvernementales et les professionnels des médias.

I.       Projet de recommandation

1.       Avec l’avènement de la société de l’information, l’individu vit aujourd’hui plongé dans un flot de messages véhiculés par les médias. Apparemment, il n’y a pas de limite à la quantité d’informations disponibles.

2.       Cependant, de nouveaux défis apparaissent. Les médias modernes offrent d’innombrables sources d’informations et permettent à tout un chacun, dans des proportions jamais connues à ce jour, de lancer des messages dans l’espace public. Il devient de plus en plus difficile de s’orienter dans cette masse considérable d’informations. Les problèmes résultent non seulement du volume, mais aussi de la nature même des communications. La réalité des médias n’est pas la réalité «vraie». Or, dans un monde dominé par la culture des médias, la frontière entre fait et fiction devient souvent floue.

3.       Cependant, pour beaucoup d’enfants et de jeunes, les médias modernes et surtout l’Internet sont plus qu’un simple moyen de s’ouvrir sur le monde. Les médias sont «leur» monde, leur «réalité virtuelle», où tout, le meilleur et le pire, peut être fait et défait. Les jeunes font souvent preuve de beaucoup plus d’enthousiasme que les adultes pour l’utilisation des nouvelles technologies et ils les maîtrisent bien mieux que leurs aînés, mais leur capacité de discernement et leur aptitude à émettre des jugements réfléchis ne sont pas encore bien développées.

4.       Souvent, enseignants et parents ne parviennent pas à combler le fossé entre leur vécu et leur expérience professionnelle d’une part et l’expérience que vivent leurs enfants à travers les nouveaux médias, d’autre part. De nombreux adultes ont de plus en plus de mal à s’adapter eux-mêmes aux changements envahissants apportés par les moyens de communications modernes.

5.       A une plus grande échelle, les médias sont, par nature, capables d’influer sur les attitudes et les comportements dans la société. On ne manque pas d’exemples en Europe montrant que les médias libres et indépendants exercent un réel pouvoir de promotion de la démocratie, alors qu’entre les mains de forces totalitaires, ils peuvent devenir des instruments d’incitation à la haine raciale et de manipulation de l’opinion. On entend dire souvent aussi qu’il existe un lien étroit entre l’augmentation de la violence dans la société et les images violentes véhiculées par la télévision et Internet ou les jeux vidéos.

6.       La mondialisation et la convergence des médias, à côté de toutes les merveilleuses possibilités qu’elles offrent, suscitent également de nouvelles inquiétudes: surabondance d’informations, uniformisation en raison de la prédominance absolue d’une seule langue et d’une seule culture sur les nouveaux médias, commercialisation accrue, sans parler du risque grave de voir naître de nouvelles formes d’exclusion sociale pour ceux qui ne peuvent pas communiquer à travers des médias et/ou sont incapables d’en évaluer le contenu d’un oeil critique.

7.       Les démocraties européennes disposent de nombreux instruments pour relever les défis que pose cette société en mutation. La situation actuelle montre, toutefois, qu’il est urgent aussi de prendre des mesures éducatives plus fermes et plus radicales pour favoriser l’utilisation active, critique et réfléchie des médias: en d’autres termes, pour mettre en place une éducation aux médias.

8.       L’éducation aux médias peut se définir comme des pratiques d’enseignement ayant pour but de développer certaines compétences liées à l’utilisation des médias, à savoir une attitude critique et réfléchie vis-à-vis des médias pour former des citoyens équilibrés, capables de se forger leur propre opinion à partir des informations disponibles. Grâce à cette éducation, les citoyens doivent pouvoir accéder aux informations nécessaires, les analyser et identifier les intérêts sous-jacents d’ordre économique, politique, social et/ou culturel. L’éducation aux médias consiste à apprendre aux individus à interpréter et à créer des messages, à sélectionner les médias les plus appropriés pour communiquer et, éventuellement, à influer davantage sur l’offre et le contenu des médias.

9.       L’éducation aux médias permet aux individus d’exercer leur droit à la liberté d’expression et leur droit à l’information. Elle n’est pas seulement bénéfique pour leur développement personnel, elle développe aussi la participation et l’interactivité dans la société. En ce sens, elle les prépare à la citoyenneté démocratique et à la prise de conscience politique.

10.       L’éducation aux médias fait partie du programme scolaire dans plusieurs pays européens, néanmoins son application pratique reste problématique, même en ce qui concerne les médias traditionnels. Les éléments clés de l’éducation aux médias sont des enseignants qualifiés et le matériel d’enseignement, par conséquent il convient d’accorder une attention constante à la formation initiale et continue des enseignants. Des incertitudes persistent aussi quant à la place de cette éducation dans les programmes, sa méthodologie, les objectifs poursuivis et l’évaluation des résultats. En outre, la plupart des établissements scolaires n’ont pas encore intégré un schéma pédagogique dans lequel élèves et enseignants se placent eux-mêmes en situation d’apprenants.

11.       L’éducation aux médias devrait s’adresser à la fois aux adultes d’aujourd’hui et à ceux du futur. L’objectif n’est pas seulement de les aider à suivre le rythme du développement moderne, il est aussi de leur apprendre à mieux remplir leur rôle de parent. Dans cette perspective, il est vital de concevoir une éducation aux médias dans le cadre d’un apprentissage tout au long de la vie. Cette éducation non formelle devrait être dotée de plus de moyens et il faudrait faciliter les travaux des ONG pertinentes, conformément à la Recommandation de l’Assemblée 1437 (2000) sur l’éducation non formelle.

12.       Il est indispensable aussi de rechercher la coopération et la participation des professionnels des médias. Il faut surtout les encourager à produire des programmes éducatifs et culturels de grande qualité.

13.       L’Assemblée recommande donc au Comité des Ministres :

i. de considérer l’éducation aux médias comme un secteur d’activité important pour les organes compétents de l’Organisation dans les domaines de l’éducation à la citoyenneté démocratique, des nouvelles technologies de l’information et de l’éducation non formelle, conformément aux orientations définies dans la Recommandation 1437 (2000) de l’Assemblée sur l’éducation non formelle;

ii. de veiller à une approche coordonnée, intersectorielle de cette question ;

iii.       d’examiner les pratiques en vigueur dans le domaine de l’éducation aux médias dans les Etats membres afin de promouvoir celles qui donnent les meilleurs résultats;

iv.       de promouvoir une approche européenne intégrée de l’éducation aux médias – en créant éventuellement un bureau international pour l’éducation aux médias responsable de la coordination et de la mise en réseau – en étroite collaboration avec d’autres organisations internationales, comme l’Union européenne et l’Unesco;

14.       Le Comité des Ministres devrait aussi inviter les gouvernements et les autorités compétentes des Etats membres:

i.       d’encourager l’élaboration et le développement de programmes d’initiation aux médias pour les enfants, les adolescents et les adultes;

ii.       de promouvoir l’élaboration de programmes de formation pour les enseignants dans le domaine de l’éducation aux médias;

iii.       d’amener les organismes éducatifs, les organisations parentales, les professionnels des médias, les fournisseurs de services Internet et les ONG, etc., à prendre part au dialogue sur ces problèmes;

iv.       d’étudier le moyen d’encourager l’offre, par les différents médias, de programmes éducatifs qui soient satisfaisants sur le plan à la fois quantitatif et qualitatif et de promouvoir l’éducation aux médias dans ces programmes.

II. Exposé des motifs par Mme Isohookana-Asunmaa

A. Introduction

1.       Avec l’avènement de la société de l’information, les derniers obstacles à l’information sont en train de disparaître. Du journal local que l’on reçoit tous les matins au courrier électronique qui s’affiche sur le téléphone mobile et à la radio et télévision accessibles par l’ordinateur, le citoyen d’aujourd’hui est confronté quotidiennement à une masse considérable de messages. Apparemment, il n’y a pas de limite à la quantité d’informations disponibles.

2.       Mais les citoyens d’aujourd’hui sont-ils vraiment mieux informés? Peuvent-ils filtrer les innombrables sources d’information pour n’en garder qu’un petit nombre en fonction du temps limité dont ils disposent? Sont-ils certains que ces sources sont fiables? Les jugements qu’ils portent sur ce qu’ils ont lu/entendu/vu sont-ils vraiment les leurs? A partir de cela, sont-ils certains de donner leur temps, leur argent et leur voix à des personnes ou des causes qui seront pour eux les meilleures?

3.       La réalité des médias n’est jamais la réalité «réelle», même si elle le paraît. Mais dans un monde dominé par la culture des médias, les limites entre les faits et la fiction se brouillent souvent. Si distinguer entre les deux n’est pas simple en général, la situation se complique encore plus pour ce qui est des enfants et des jeunes. Pour nombre d’entre eux, les médias modernes et tout particulièrement Internet sont plus qu’un simple moyen d’apprendre à connaître le monde. Ils sont leur monde, leur «réalité virtuelle», où tout est possible, le pire et le meilleur. Les jeunes sont souvent plus avides que les adultes d’exploiter les nouvelles technologies et le font avec plus de facilité, alors que leur capacité de discernement et leur aptitude aux jugements de valeur ne sont pas encore bien développées.

4.       Enseignants et parents sont souvent désarmés lorsqu’ils essayent de concilier leur expérience personnelle et professionnelle avec l’énorme masse d’informations dans laquelle leurs enfants sont plongés. Beaucoup d’adultes éprouvent de plus en plus de difficultés à s’adapter aux transformations entraînées par les communications modernes.

5.       Sur une plus grande échelle, les médias sont capables de par leur nature d’influer sur les attitudes et les comportements. Il suffit de rappeler le rôle joué par certaines radios occidentales pour la promotion des valeurs démocratiques en Europe centrale et orientale de l’ère communiste. Mais cette influence peut s’exercer également dans des directions opposées. Les médias ont certainement joué un rôle très important dans les conflits de l’ex-Yougoslavie en incitant à la haine ethnique et en véhiculant des stéréotypes. Aussi, on prétend souvent qu’il existe un lien fort entre la montée des actes de violence perpétrés par les jeunes et la violence des images de télévision et d’Internet ou des jeux informatiques.

6.       La mondialisation et la convergence des médias, parallèlement à toutes les énormes possibilités qu’elles offrent, suscitent également de nouvelles préoccupations: la surabondance d’informations, l’uniformisation causée par la domination sans équivoque d’une langue et d’une culture sur les nouveaux médias; la commercialisation accrue. Même si, de l’avis de la plupart des experts, les nouveaux médias ne remplaceront pas les médias existants, mais les compléteront et les enrichiront, des chercheurs observent que les attitudes des utilisateurs des médias sont déjà en train de changer pour aller vers un niveau plus élevé encore de consommation des nouveaux médias, de participation et d’isolement.

7.       On prétend que, d’ici à ce qu’elle atteigne l’âge de 70 ans, la génération actuelle aura passé dix ans devant la télévision et aura assisté à 16 000 meurtres!

8.       Devant des perspectives aussi préoccupantes, comment pouvons-nous concilier la liberté d’expression, élément vital de toute société démocratique, avec la nécessité évidente d’assurer une certaine protection aux jeunes et de permettre aux adultes d’affronter une réalité complexe?

9.       Les avis vont d’un extrême à l’autre du spectre – de la défense absolue de la liberté totale de parole à des appels à une législation restrictive et à des dispositifs techniques mieux conçus pour empêcher les enfants de voir des images indésirables. Les experts répondent à cette dernière demande en démontrant que les dispositifs restrictifs s’avèrent souvent contreproductifs.

10.       Quelle que soit la réponse, il y a selon nous un besoin urgent de mesures éducatives plus nettes et plus radicales en vue d’une utilisation active, critique, et clairvoyante des médias: en d’autres termes, il faut développer l’éducation aux médias. Cette éducation doit s’adresser aux enfants, aux parents et aux enseignants. Elle devrait se poursuivre tout au long de la vie et nécessite une approche coordonnée, à laquelle les ONG et les professionnels des médias doivent également être associés.

11.       La commission de la culture et de l’éducation de l’Assemblée parlementaire a décidé d’engager un large dialogue politique sur cette question. Elle a invité la Commission de la culture, de la jeunesse, de l’éducation, des médias et du sport du Parlement européen à organiser conjointement une audition avec la participation d’experts, de professionnels de l’éducation aux médias, des ONG et de journalistes, le 23 mars 2000 à Bruxelles. Les principaux points qui y ont été soulevés ont été largement utilisés pour l’élaboration du présent rapport (voir Addendum).

B. Qu’est-ce que l’«éducation aux médias»

12.       Plusieurs expressions se rapportent à ce que l’on appelle le plus couramment l’«éducation aux médias»; «apprentissage des médias»; «étude des médias»; «apprentissage assisté par la technologie»; «technologie éducative»; «médias éducatifs». En Allemagne, l’expression «compétence en matière de médias» est largement utilisée, alors que les experts espagnols élargissent cette notion à «compétence sociale». Ces dernières années, l’expression anglosaxonne « media literacy » (« familiarité avec les médias ») est très utilisée.

13.       Certaines de ces expressions sont soit trop larges, soit trop étroites pour être retenues ici, puisqu’elles recouvrent des aspects comme l’éducation s’appuyant sur les médias (par exemple, le recours à du matériel d’enseignement médiatique). Le présent rapport portera donc uniquement sur l’«éducation aux médias», c’est-à-dire sur les techniques d’enseignement qui visent à développer la compétence en matière de médias, définie comme une attitude critique et clairvoyante à l’égard des médias, de manière à former des citoyens équilibrés, capables de se forger leur propre opinion à partir des informations disponibles.

14.       De plus, l’éducation aux médias est généralement envisagée dans l’optique de la protection des jeunes contre la violence et les autres contenus préjudiciables. Le présent rapport se propose d’étudier cette question sous un angle plus large, incluant les aspects politiques, sociaux, culturels et ceux intéressant le consommateur.

15.       Personne n’est tout à fait «initié» ou «non initié» en termes de compétence en matière de médias. Il s’agit là d’un processus continu qui doit être développé par la pratique et l’éducation. C’est également une notion pluridimensionnelle qui comporte des aspects cognitifs, émotionnels, esthétiques et moraux.

16.       La compétence en matière de médias comporte non seulement le sens critique, mais aussi l’autonomie critique. En d’autres termes, le citoyen doit être capable, dans le milieu où il évolue, de produire des messages au moyen de divers médias et d’utiliser ces médias, tout en étant apte à porter un jugement critique sur les messages transmis dans différents contextes.

Selon le professeur finlandais d’éducation aux média, Tapio Varis, la compétence en matière de médias peut se définir comme la maîtrise des cinq éléments suivants:

– tous les médias sont des entités culturelles. Il est important de connaître leurs structures;–

– les divers médias ont chacun leur langage. Le meilleur moyen de se familiariser avec eux est d’apprendre à produire soi-même des messages dans ces différents langages;–

– le public interprète les messages de différentes manières. Il est important de prendre conscience de la façon dont on interprète soi-même les messages; –

– dans une économie de marché puissante, les médias sont fortement incités à produire certains types de contenus. La connaissance des intérêts qu’ils défendent diminue le danger d’être manipulé; –

– il n’existe pas de milieu médiatique neutre. Il est indispensable de connaître les conceptions qui déterminent la démarche de chaque média.

17.       D’après les conclusions auxquelles sont arrivés les experts assistant à la Conférence de Vienne «L’éducation aux médias à l’ère numérique» (avril 1999) organisée par l’Autriche en coopération avec l’Unesco, l’éducation aux médias:

«– concerne tous les médias de communication […];–

    – permet aux citoyens de comprendre les moyens de communication utilisés dans leur société et la manière dont ils fonctionnent, et d’acquérir la capacité d’utiliser ces médias pour communiquer avec autrui;–

– assure que les citoyens apprennent à:-

    • – analyser les textes des médias, les aborder avec esprit critique et en créer eux-mêmes;

      – identifier les sources des textes parus dans les médias, leurs intérêts politiques, sociaux, commerciaux et/ou culturels, ainsi que leurs contextes;

– interpréter les messages et valeurs offerts par les médias;

    • – sélectionner les moyens appropriés pour communiquer leurs messages ou compositions et pour atteindre l’audience visée;

– obtenir ou exiger l’accès aux médias à la fois pour la réception et pour la production.»

18.       L’éducation aux médias permet aux citoyens d’exercer leur droit à la liberté d’expression et leur droit à l’information. Elle n’est pas simplement bénéfique pour l’épanouissement personnel, mais elle favorise également la participation et l’interactivité au sein de la société. Dans ce sens, elle est un élément important de l’éducation à la citoyenneté démocratique.

19.       La résolution sur l’éducation aux médias et aux nouvelles technologies (paragraphe 5), adoptée par les ministres européens de l’Education lors de la session de leur conférence permanente tenue à Istanbul en 1989, résume l’évolution importante qu’a connue ce domaine dans les années 80 en même temps qu’elle définit les grandes lignes d’un programme pour les années 90. Après plus de dix ans, les objectifs fixés dans ce texte – actualisé pour tenir compte des nouveaux médias – restent valables. Aujourd’hui, toutefois, il est temps de passer à l’action:

«L’éducation aux médias et aux nouvelles technologies devrait jouer un rôle libérateur et de responsabilisation et préparer ainsi les élèves à leur rôle de citoyens de pays démocratiques en favorisant la prise de conscience politique. Il s’agit d’amener les élèves à comprendre les structures, les mécanismes et les messages des médias. Il convient de les amener à développer leur capacité à former un jugement critique sur le contenu des médias. Il est possible d’atteindre ce but, c’est l’un des objectifs de cette formation, en encourageant leur créativité et en les amenant à bâtir leurs propres messages médiatiques, de façon à leur donner les moyens de profiter des occasions qui leur sont offertes d’exprimer leurs intérêts personnels dans le contexte d’une participation au niveau local.»«

«Etant donné le rôle primordial que jouent les médias tels que la télévision, le cinéma, la radio et la presse dans la vie culturelle des enfants, l’éducation aux médias devrait être mise en place le plus tôt possible et se poursuivre tout au long de la scolarité obligatoire. Il convient également de ne pas négliger le rôle des parents dans l’éducation aux médias. De nouvelles recherches seront nécessaires pour déterminer quel vécu des médias les enfants apportent à l’école ainsi que la façon dont l’éducation aux médias permettra de développer leur compréhension, leurs connaissances et leurs compétences dans ce domaine.»«

«Néanmoins, si nous voulons que cet enseignement soit réellement efficace, une réflexion sur l’éthique de la communication et de l’information s’impose. Les enseignants ont un rôle à jouer dans cette recherche. Car il ne s’agit pas seulement d’adapter l’école au monde des nouvelles technologies de l’information et de la communication, il s’agit également d’amener le monde des médias à écouter les questions que posent les enseignants sur le respect des hommes, des femmes et des jeunes dans la transmission audiovisuelle de l’information.»2

20.       En d’autres termes, l’éducation aux médias devrait également permettre aux citoyens d’exercer une plus grande influence sur la production médiatique. Elle devrait élever le sens des responsabilités des médias et de la société dans son ensemble.

C. Historique

21.       Bien que l’éducation aux médias existe depuis plus d’un demi-siècle, elle dépend toujours d’initiatives individuelles et locales et même si elle constitue aujourd’hui une composante des programmes de plusieurs pays, son application pratique est toujours problématique.

22.       La question a fait son apparition dans les années 30, d’abord en Grande-Bretagne. L’heure était alors au pessimisme. L’on craignait que les jeunes ne soient détournés de formes d’art plus nobles, telles que la littérature sérieuse.

23.       Ce n’est que dans les années 60 que l’on commença, en Europe, à considérer les effets des médias sur le public d’un œil généralement plus favorable. La dimension esthétique et artistique de la culture populaire fut progressivement reconnue.

24.       Un débat perdure depuis plusieurs dizaines d’années: est-il possible de démontrer que la télévision est directement à l’origine de comportements destructeurs? Et si les problèmes de la société sont imputés à un seul média, ne risque-t-on pas d’oublier la cause profonde de la violence? En tout état de cause, il est admis que les structures de la société de l’information ont une influence grandissante. Les jeunes doivent donc apprendre à tirer profit de la masse d’informations dont les inondent les médias.

25.       Dans la première moitié des années 90, les réseaux d’information ont commencé à conquérir les foyers et les écoles et sont devenus monnaie courante dans les entreprises et les administrations publiques. Ce phénomène s’est accompagné d’un effort éducatif sans précédent, car des générations entières devaient s’initier à l’informatique et se familiariser avec l’utilisation de l’Internet. Malheureusement, il est de plus en plus difficile de doubler cet effort d’initiation d’une éducation satisfaisante au contenu des nouveaux médias.

26.       Tandis que les décideurs et la société dans son ensemble débattaient sans fin des possibilités de contrôler et de réglementer l’Internet, la «cybergénération» venait au monde. Pour la première fois, une génération est, dans sa majorité, plus au fait des nouveaux médias que celle qui l’a précédée.

27.       Entre-temps, une nouvelle réalité médiatique commence à prendre forme au niveau mondial – nous entrons dans l’ère dite de la «convergence» entre tous les médias existants.

28.       Jusqu’à présent, des travaux relativement nombreux ont été consacrés à la mise au point d’une méthodologie de l’éducation aux médias classiques, dans le monde entier, et notamment dans les pays anglo-saxons et nordiques. Cependant, l’ère de la «convergence» pose de nouveaux défis auxquels l’éducation aux médias semble peu préparée. A vrai dire, même l’éducation aux médias classiques n’est pas encore banalisée dans toutes les écoles européennes. Aussi semble-t-il urgent d’activer et de développer tous les mécanismes possibles d’éducation scolaire et extrascolaire afin de faciliter la vie dans la société de l’information aux enfants comme aux adultes.

D. L’éducation aux médias – où et comment?

29.       De nombreuses questions persistent concernant la méthodologie et le contenu de l’éducation aux médias: l’initiation aux médias est-elle quelque chose qui peut s’enseigner? Doit-elle constituer une discipline distincte ou traverser tout le programme, etc.? Les éléments de la compétence en matière de médias semblent difficiles à définir et plus encore à évaluer à l’aide des méthodes types d’appréciation. Et que faut-il évaluer: la connaissance? les aptitudes? le comportement? les attitudes? les valeurs? Qui évalue et comment décider du moment où l’apprenant est initié aux médias?

30.       Le présent rapport n’essaie pas de répondre à toutes ces questions mais souligne plutôt le sérieux des problèmes et la nécessité d’une action appropriée pour les résoudre.

31.       Il est clair toutefois que l’éducation aux médias doit être centrée sur l’utilisateur et constituer un projet commun auquel coopèrent toutes les parties concernées. Toucher les adultes pourrait se faire par le biais des services sociaux et de l’éducation non formelle telle que les universités populaires, les ONG et les programmes de télévision.

(a) à l’école

32.       Il est clair que l’éducation aux médias ne peut être intégrée avec succès que dans un système éducatif efficace. Or, la plupart des systèmes européens traversent aujourd’hui un douloureux processus de transition.

33.       L’éducation aux médias est liée à un processus d’expérimentation et d’apprentissage; à ce titre, elle peut être intégrée à diverses matières du programme. Les plus évidentes sont la langue maternelle, les études sociales et l’informatique, mais elle trouve aussi sa place dans des matières comme l’histoire et les langues étrangères.

34.       Toutefois, aucun individu ne peut maîtriser tous les aspects de la question des médias. Il peut être judicieux de répartir les compétences entre les enseignants. Cependant, en intégrant l’éducation aux médias à l’ensemble du programme d’enseignement, on court le risque que personne n’en assume réellement la responsabilité.

35.       L’initiation aux médias ne pouvant être évaluée par les méthodes types d’appréciation des élèves, elle exige des aptitudes spéciales de la part des enseignants. Ceux-ci doivent à la fois avoir une bonne connaissance du sujet et maîtriser une nouvelle forme de pédagogie. C’est pourquoi l’enseignant doit plutôt jouer le rôle d’un guide. Il se trouve comme ses élèves dans la situation d’un apprenant.

36.       Ainsi repensée, l’école n’est plus centrée sur l’enseignement, mais sur l’apprentissage. Parallèlement, elle s’ouvre davantage sur la société.

37.       Des études ont montré qu’en matière d’éducation aux médias, des améliorations étaient surtout nécessaires dans les domaines de la formation des enseignants, ainsi que de la formation de base et complémentaire, d’une plus grande coopération avec les professionnels des médias et de l’élaboration de matériels d’enseignement. Malheureusement, il n’y a pas d’approche européenne commune de la formation des enseignants dans ce domaine et cela constitue assurément un obstacle à son développement.

38.       La création de réseaux aux niveaux local, national et européen est essentielle. Elle aiderait les enseignants dans leur travail, non seulement dans la recherche de matériels pour l’éducation aux médias, mais également en élargissant leur champ d’expérience et en améliorant leur adaptation aux effets de la mondialisation de l’industrie des médias. En outre, les programmes d’éducation aux médias doivent faire l’objet d’une évaluation permanente. Enfin, des professeurs spécialisés dans l’éducation aux médias pourraient être mis à la disposition de certaines écoles ou académies.

39.       L’éducation aux médias ne relève pas seulement de l’école et des institutions de formation des enseignants. Des postes se rattachant à cette discipline pourraient être créés en plus grand nombre dans les universités et des liens devraient être établis entre eux.

(b) Education non formelle

40.       Introduire l’éducation aux médias dans les programmes est nécessaire, mais pas suffisant. L’importance de l’éducation non formelle aux médias est double. D’un côté, il semble qu’elle soit le seul moyen de toucher aujourd’hui les adultes qui n’ont pas reçu d’éducation aux médias. De l’autre, elle est en train de devenir un élément capital de l’apprentissage tout au long de la vie sans lequel la jeunesse d’aujourd’hui ne sera pas en mesure d’affronter les défis de la société de la connaissance.

41.       Les adultes d’aujourd’hui ont besoin de recevoir une éducation aux médias non seulement pour leur développement personnel mais aussi en tant que parents.

42.       Une des raisons pour lesquelles les parents devraient être associés à l’éducation aux médias est que celle-ci est une discipline relativement nouvelle et peu connue. Mais si les enseignants ont besoin de la compréhension et du soutien des parents, c’est surtout parce que l’éducation aux médias dispensée par l’école risque de se heurter aux convictions de ces derniers. Elle est également susceptible d’empiéter sur les habitudes familiales de consommation des médias, ce qui en fait une source potentielle de conflit. Aussi, plutôt que de demander simplement aux parents d’approuver ce qui est fait à l’école, les enseignants pourraient nouer avec eux un dialogue actif. L’expérience a montré qu’une telle démarche conduisait souvent les parents à s’intéresser personnellement à la question et à demander des informations complémentaires. De nombreux formateurs aux médias ont organisé des cours du soir à l’intention des parents pour stimuler cet intérêt.

43.       Les contacts avec les parents sont trop importants pour n’être que sporadiques: les enseignants devraient adopter une stratégie pour s’assurer de leur participation et de leur soutien.

44.       Les écoles pourraient être le lien entre les adultes et les enfants et devraient devenir des relais d’apprentissage pour la communauté. D’autres lieux permettant l’accès du public aux nouveaux médias, tels que bibliothèques, services d’information du public, cyber-cafés, devraient être mis en place.

45.       A l’heure actuelle, les ONG sont les principales dispensatrices d’éducation non formelle (voir Recommandation 1437 (2000) de l’Assemblée relative à l’éducation non formelle).

46.       Dans de nombreux pays, il existe des associations qui sont très actives dans ce domaine depuis longtemps.

47.       A l’échelon européen, les professionnels de l’éducation aux médias audiovisuels sont remarquablement bien organisés au sein de l’Association européenne pour l’éducation aux médias audiovisuels (AEEMA). Créée en 1989 sous l’égide de la Commission européenne et du Conseil de l’Europe, cette association compte actuellement environ 250 membres. Depuis une dizaine d’années, elle est le principal réseau européen assurant une coordination des professionnels de l’éducation aux médias en vue du développement de la culture audiovisuelle.

48.       L’association est ouverte aux particuliers ainsi qu’aux institutions publiques ou privées, organisations, associations et autres instances concernées par l’éducation aux médias sur un plan professionnel. Outre ses publications, elle dispose d’un site web qui permet de mettre en relation l’ensemble des professionnels et constitue une précieuse source d’information.

49. Les difficultés et les besoins de l’éducation aux médias ne devraient toutefois pas être laissés aux modestes efforts actuels des seules associations. Les pouvoirs publics devraient les doter de davantage de moyens pour qu’elles puissent remplir leur tâche. En même temps, il faudrait s’atteler concrètement à la création d’une approche européenne commune de l’éducation aux médias.

(c) Le rôle des professionnels des médias

50.        Cette collaboration est l’une des clés du succès de l’éducation aux médias. Tout d’abord, les formateurs aux médias ont besoin d’établir de nombreux contacts au sein du secteur des médias afin de se tenir au courant de ses évolutions. D’autre part, l’éducation aux médias devrait prendre la forme d’un dialogue, car il serait contreproductif de détourner les élèves des médias.

51. Les formateurs peuvent assurer les professionnels que leur intention n’est nullement d’agir dans un but politique ou moral particulier, mais que leur seul souci est de permettre à leurs élèves de mieux comprendre les médias. Ils devraient toutefois ne laisser planer aucun doute dans l’esprit des praticiens en leur faisant bien comprendre que leur contribution à l’éducation aux médias ne saurait être un moyen de faire passer un message particulier, qu’il soit politique ou commercial.

52. Un élément positif est que, de par leur nature même, les médias, et en particulier la télévision et Internet, constituent un excellent outil pédagogique. Toutefois, tandis que la plupart des institutions de radiodiffusion ont développé une large gamme de programmes éducatifs au fil des années, et que, tout récemment, Internet a commencé d’assumer un rôle analogue, l’éducation aux médias dispensée par les médias n’est pas encore devenue une pratique courante. Pourtant, les initiatives existantes ont connu un très grand succès et ont montré que la demande est supérieure à l’offre. Par exemple, ainsi qu’il a été signalé à l’audition de Bruxelles, le projet de Nos/Teleac (Télévision éducative néerlandaise) «Regarder la télévision d’une manière différente», qui comparait la violence représentée dans les films de Hollywood et le travail quotidien de la police «réelle», a touché 48 % de l’ensemble des écoles néerlandaises. Cela a encouragé Nos/Teleac à produire des programmes sur la subjectivité des bulletins d’information et à organiser un atelier à l’intention des enseignants.

53. L’une des raisons pour lesquelles l’éducation des médias dispensée par les médias n’est pas si courante réside dans le malaise qui se répercute sur la qualité et les programmes éducatifs européens en général. La mondialisation et la commercialisation croissantes des productions médiatiques font qu’il est de plus en plus difficile d’investir de l’argent dans des productions télévisées qui ne sont pas destinées à une large audience et qui ne sont donc pas susceptibles d’intéresser les annonceurs. De ce fait, ces programmes se font de plus en plus rares et de moins en moins convaincants en termes de qualité, ce qui réduit encore les fonds qui leur sont affectés. Ce n’est pas le rôle du présent rapport de suggérer des manières de sortir de ce cercle vicieux, mais il est clair que l’une ou l’autre forme d’incitation devrait être trouvée pour les organismes de télévision et les producteurs de contenu sur Internet afin qu’ils incluent l’éducation aux médias dans leurs programmes éducatifs.

54. Une manière intéressante d’avancer dans ce domaine a été suggérée lors de l’audition par le représentant de la radio nationale de Rhénanie-du-Nord–Westphalie. Une loi allemande oblige les institutions de radiodiffusion régionales à apporter un soutien financier aux projets menés dans le domaine de l’éducation aux médias. Le débat public sur l’éducation aux médias a également eu de l’influence sur les institutions de radiodiffusion privées et les a amenées à accepter plus volontiers de participer à des projets en matière d’éducation aux médias.

E. Approche intégrée

55.       En Europe, parmi les pays qui ont intégré l’éducation aux médias dans les programmes officiels d’enseignement et de formation des enseignants, on compte au moins la Finlande, la Grande-Bretagne, la Norvège, la France, la Suède et la Suisse. Cela n’est pas suffisant: c’est pourquoi une approche coordonnée est nécessaire pour généraliser l’éducation aux médias. Il serait également souhaitable que les pays d’Europe prennent en compte les travaux menés dans ce domaine par des pays comme les Etats-Unis, le Canada et l’Australie.

Le Conseil de l’Europe

(a) Activités intergouvernementales

56.       Plusieurs secteurs du Conseil de l’Europe s’occupent, plus ou moins directement, d’éducation aux médias, les principaux étant le Conseil de la coopération culturelle (CDCC) et le Comité directeur sur les moyens de communication de masse (CDMM). Ces deux organes se penchent également sur la question des nouvelles technologies. Il est certain que l’éducation aux médias est un concept très large. La meilleure façon de l’aborder pourrait être une approche intersectorielle, pour autant que deux conditions soient réunies: une volonté politique claire et une coordination efficace.

57.       Ces dernières années, l’une des principales réalisations du Conseil de l’Europe dans le domaine de l’éducation aux médias a été la publication de l’ouvrage L’éducation aux médias dans l’Europe des années 90 (Editions du Conseil de l’Europe, 1994). L’objectif de cette étude était de fournir aux enseignants, formateurs et décideurs un guide sur la façon dont l’éducation aux médias pourrait être développée au cours des années 90. Cet ouvrage, qui reste d’actualité à bien des égards, devrait être mis à jour et réédité dès que possible.

58.       Certains aspects de l’éducation aux médias ont également été abordés dans le cadre du projet «Démocratie, droits de l’homme, minorités: les aspects éducatifs et culturels», mené par le CDCC de 1993 à 1997.

59.       Le projet actuellement mis en œuvre par le CDCC, «Education à la citoyenneté démocratique», a été lancé en 1997 en vue de définir les valeurs et les compétences dont ont besoin les individus pour devenir des citoyens actifs et de déterminer comment ils peuvent acquérir ces compétences et apprendre à les transmettre à d’autres. L’éducation aux médias s’inscrit à double titre dans ce projet.

60.       D’une part, le Conseil de l’Europe et le «site de citoyenneté» de Strasbourg ont organisé, en collaboration avec le Centre universitaire d’enseignement du journalisme de Strasbourg, un cours sur «Logique éditoriale et citoyenneté». L’objectif de ce cours destiné à des jeunes marginalisés (15-17 ans) était de leur permettre de comprendre et d’analyser la manière dont les médias présentent la réalité dans laquelle ils vivent.

61.       D’autre part, un projet de formation de longue durée, étalé sur trois ans, et intitulé «L’apprentissage et l’enseignement de la citoyenneté démocratique: approches critiques des médias dans l’éducation civique», a réuni des experts d’Autriche, de Hongrie, des Pays-Bas, de Pologne, de Slovénie et de Roumanie. Les buts de ce projet sont les suivants: examiner les liens entre l’éducation civique et l’éducation aux médias, encourager des projets nationaux et internationaux et réaliser des matériels d’enseignement.

62.       Cette initiative doit être encouragée et soutenue par le Conseil de l’Europe et des ressources budgétaires et autres devraient lui être allouées afin que ces matériels d’enseignement puissent être élaborés rapidement, traduits et diffusés aussi largement que possible.

63.       Le CDCC, dans le cadre de son programme «Cohésion sociale, sécurité démocratique et politiques éducatives», a organisé deux séminaires sur l’impact des nouvelles technologies de l’information sur les écoles (Strasbourg, 16-17 novembre 1998) et sur les raisons d’investir et les stratégies d’investissement (Jurmala, Lettonie, 8-10 juillet 1999).

64.       Le CDMM, pour sa part, a été à l’origine de plusieurs résolutions et recommandations du Comité des Ministres, dans lesquelles figurent notamment des réflexions sur l’éducation aux médias: Résolution (67) 13 sur la presse et la protection des jeunes; Recommandation n° R (79) 1 sur l’éducation des consommateurs adultes et l’information du consommateur; Recommandation n° R (90) 10 sur le cinéma pour enfants et adolescents; Recommandation n° R (97) 19 sur la représentation de la violence dans les médias électroniques. Enfin, la Déclaration de Budapest «Pour une Grande Europe sans clivages» (adoptée par le Comité des Ministres le 7 mai 1999) exhorte les Etats membres, en ce qui concerne la maîtrise des nouvelles technologies de l’information, à «aider les individus à développer leurs compétences en matière d’utilisation des nouvelles technologies de l’information» et à leur «permettre ainsi (…) d’utiliser ces technologies de manière active, en faisant preuve de sens critique et de discernement».

65.       Le CDMM envisage à présent de promouvoir la formation et l’éducation par les médias et l’industrie d’Internet.

66.       D’autres secteurs du Conseil de l’Europe sont également concernés par cette question. Au sein du regroupement «Education et culture» des ONG, un sous-groupe est consacré à l’éducation aux médias. Le sujet retenu en priorité est l’impact des nouvelles technologies de l’information sur les systèmes scolaires. A moyen terme, le sous-groupe souhaite élaborer un guide pratique à l’intention des écoles. Dans son prochain projet, il s’agira d’enseigner aux jeunes à réagir de manière critique face aux médias, pour contribuer à l’apprentissage de la citoyenneté démocratique.

67.       Enfin, le Centre de la jeunesse a aidé des ONG à organiser des séminaires sur l’éducation aux médias.

(b) L’Assemblée parlementaire

68.       Dans presque toutes ses recommandations et résolutions relatives aux médias, l’Assemblée engage le Comité des Ministres à promouvoir l’éducation aux médias: Recommandation 1215 (1993) relative à l’éthique du journalisme; Recommandation 1277 (1995) relative aux migrants, aux minorités ethniques et aux médias; Recommandation 1276 (1995) relative au pouvoir de l’image; Recommandation 1379 (1998) relative à l’instruction élémentaire en science et technologie; Recommandation 1407 (1999) relative aux médias et à la culture démocratique.

Autres organisations internationales

(a) L’Union européenne

69.       L’un des objectifs de l’initiative «eEurope» de la Commission européenne est de faire de la culture numérique l’une des connaissances de base de tout jeune Européen. En mars 2000, a été annoncé le lancement du projet eLearning qui se propose de mettre en œuvre la partie éducation/formation de eEurope.

70.       Cette initiative comporte quatre éléments: un effort d’équipement en ordinateurs multimédia des écoles, un effort de formation des enseignants européens aux technologies numériques, le développement de services et logiciels éducatifs européens et l’accélération de la mise en réseau des écoles et des formateurs.

71.       Quant aux deux premiers éléments, eLearning se fixe, dans le cadre de eEurope, les objectifs suivants: pour la fin de l’année 2001, toutes les écoles devront avoir accès sur Internet à des ressources multimédia et des services de soutien, y compris des informations et des ressources pédagogiques sur le web, devraient être accessibles à tous les enseignants et élèves. Tous les jeunes devront avoir accès à Internet et aux ressources multimédia dans des centres publics, y compris dans les zones les moins favorisées. Pour la fin de l’année 2002, tous les enseignants devraient disposer d’un équipement individuel et être capables d’utiliser Internet et les ressources multimédia. Tous les élèves devraient avoir un accès rapide à Internet et aux ressources multimédia dans les salles de classe. Pour la fin de l’année 2003, tous les élèves devraient avoir acquis une culture numérique au moment où ils quittent l’école. Ces objectifs, d’après Viviane Reding, commissaire européen responsable de l’éducation et de la culture, sont particulièrement ambitieux et permettront aux Européens, s’ils sont poursuivis, de rattraper une bonne part de leur retard sur les Etats-Unis.

(b) Unesco

72.       Les travaux de l’Unesco dans le domaine de l’éducation aux médias reposent surtout sur la «Déclaration de Grünwald sur l’éducation aux médias» (1982) et sur le Colloque de Toulouse «L’éducation aux médias dans le monde: nouvelles orientations» (1990).

73.       Un plan conjoint pour la promotion de l’éducation aux médias a été mis au point comme suite aux décisions pertinentes de la 29e session de la Conférence générale et aux recommandations de la Conférence de Vienne sur «L’éducation aux médias à l’ère numérique» (avril 1999). Les travaux de la Conférence de Vienne ont été publiés et une grande étude sur les programmes d’éducation aux médias à l’Unesco est en voie d’achèvement, tandis qu’une autre, en cours d’élaboration, porte sur l’éducation aux médias dans le monde entier.

74.       Le conseil exécutif, lors de sa 156e session (Paris, 25 mai-11 juin 1999), a décidé que les activités menées dans le domaine de l’éducation aux médias seraient inscrites dans le grand programme I et mises en œuvre en étroite coordination avec les activités de ce domaine déjà envisagées dans le cadre du grand programme IV. A cette fin, l’éducation aux médias a été incluse dans une résolution comme étant l’un des domaines devant faire l’objet d’un accent particulier dans la rénovation, la diversification et l’expansion de l’enseignement secondaire.

F. Conclusions

75.       L’éducation aux médias devrait devenir un domaine important pour les activités des organes compétents du Conseil de l’Europe. Les deux secteurs les plus pertinents pour une telle entreprise semblent être ceux de l’éducation à la citoyenneté démocratique et les nouvelles technologies de l’information. Cela requiert une approche coordonnée, intersectorielle de cette question.

76.       Le Comité des Ministres devrait, par ailleurs, charger ses organes compétents d’encourager l’élaboration et le développement de programmes d’initiation aux médias pour les enfants, les adolescents et les adultes, ainsi que de programmes de formation des enseignants dans ce domaine. L’éducation aux médias devrait être promue en tant qu’élément important de ses programmes relatifs à l’éducation non formelle dans le sens de la Recommandation 1437 (2000) de l’Assemblée relative à l’éducation non formelle. Il vaut la peine d’examiner les pratiques existantes en matière d’éducation aux médias dans les Etats membres en vue de favoriser les plus efficaces.

77.       Afin d’atteindre ces objectifs, le Conseil de l’Europe devrait associer à un dialogue actif sur ces questions les organes d’enseignement, les organisations de parents, les professionnels des médias, les prestataires de services de l’Internet, les ONG, etc. Il est temps de promouvoir une approche européenne intégrée de l’éducation aux médias. Cela devrait se faire en étroite coopération avec d’autres organisations internationales telles que l’Union européenne et l’Unesco.

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Commission chargée du rapport: commission de la culture et de l’éducation

Implications budgétaires pour l’Assemblée: néant

Renvoi en commission: Doc. 8407 et renvoi n° 2390 du 26.05.1999

Projet de recommandation: adopté à l’unanimité par la commission le 5 mai 2000

Membres de la commission: MM. Roseta (Chairman), Zingeris, de Puig, Ivanov (Vice-Chairmen), Arzilli, Bartumeu Cassany, Baumel, Billing, Cherribi, Chiliman (rempl.: Pop), Cubreacov, Diaz de Mera (rempl.: Varela), Dumitrescu (rempl.: Baciu), Fayot, Mme Fehr (rempl.: Gross), Mme Granlund, MM. Hadjidemetriou, Haraldsson, Hegyi, Henry, Irmer, Mme Isohookana-Asunmaa, MM. Jakic, Javelidze, Kalkan, Mme Katseli, MM. Khripel, Kiely, Kofod-Svendsen, Kovacevic, Lachat, Mme Laternser, MM. Legendre, Lemoine, Libicki, Mme Lucyga, MM. McNamara, Melnikov, Mezeckis, Monfils, Mme Moserova, M. Nagy, Mme Nemcova, MM. O’Hara, Pinggera, Polydoras, Mme Poptodorova, MM. Pullicino Orlando, Ragno, Risari, Mme Saele, M. Sağlam, Mme Schicker; MM. Schweitzer, Shaklein, Siebert, Mme Stefani, MM. Svec, Symonenko (rempl.: Khunov), Mme Troncho, Urbanczyk, Vahtre, Valk, Wilshire, Xhaferi.

N.B. Le nom des membres présents à la réunion est en italiques.

Secrétaires de la commission: M. Ary, Mme Theophilova-Permaul, et Mlle Kostenko

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